Lors de la conférence de presse, nous avons eu l’honneur de parcourir l’exposition avec les différents artistes ainsi que le commissaire de l’exposition afin de commenter tout le parcours. L’exposition « FUKAMI : Une plongée dans l’esthétique japonaise » se déroule près des Champs-Elysées, au lieu idyllique qu’est l’Hôtel Salomon de Rothschild.

Exposition haute en couleurs, sur plusieurs étages, avec dix thèmes qui nous laissent entrevoir la coordination des hommes, avec ceux qui l’entourent, tant les êtres humains, que le matériel. Touchant à notre spiritualité, les thèmes annoncés ont été les suivants :
« Prologue – Dualité d’échos »
« Exprimer les origines de la vie – Déconstruction et transmission de l’animisme »
« L’alchimie – Transformer la matière, transformation la perception »
« Esthétique de la disparition – Minimalisme »
« Vers le Sud – La réactivation par la création par les marges »
« Représentation du désastre et de la crise – Les médias vers une nouvelle existence »
« Renaissance répétée – Renaissance de l’intangible »
« Paysage subjectif – Philosophie de la légèreté »
« Hybridation – Coexistence »
« Métamorphose – Épilogue »
Yuko Hasegawa est la commissaire de l’exposition, et à titre attenant la directrice artistique du musée d’art contemporain de Tokyo. Elle nous accueille, et divulgue tous les secrets de cette exposition (en anglais, une interprète sera présente). À l’entrée, l’atypique gong pour nous accueillir. L’artiste métallier japonais Ryôhei Miyata intitule ce gong Dora, fabriqué en 2016. Au Japon, le gong est utilisé pour les services religieux bouddhiques et lors des orchestres traditionnels entre autres. Il permet aussi selon les Japonais d’éloigner les mauvais esprits et de purifier l’espace où le son retentit.

Arrivé au premier étage, l’impressionnant travail de Shinji Ohmaki, un sol retravaillé, revêtu de motifs floraux et d’oiseaux. Il est possible de piétiner sur l’oeuvre fait de pigment, afin d’en modifier le contenu initial! Il faut comprendre par là que tout est mouvement, et voué à disparaître…

Beaucoup de poteries seront visibles ce jour-là, dont ceux de Shinichi Sawada, avec tout autour des épines. Visuellement elle ressemble aux contes fantômes, animaux qui ressemblent à des monstres comme dans les films d’horreur japonais. Au même étage, nous avons un jumelage des arts : la mode inspirée de la céramique. ANREALAGE est la marque de vêtement du styliste Kunihiko Morinaga, et il s’inspire des céramiques de la période Jômon pour présenter sa collection. Créatif et surprenant, même sans explication, on sait qu’il y a une forte inspiration, grâce aux présences de quelques pièces rares qui datent de milliers d’années. Kohei Nawa aidera en partie le styliste, pour la collection Roll s’inspirant d’une des céramiques en forme cylindrique. Dans ce même petit salon, des sculptures d’un moine bouddhiste au nom d’Enku et de Pablo Picasso.

L’art ose
Anne-Laure Sacriste est une artiste contemporaine française qui nous expliquera son travail sur l’acrylique. Ses oeuvres sont disposées aux côtés des laques de Shibata. Ce dernier élément est très prisé au Japon depuis l’époque Jômon. L’une des laques les plus connues, est le maki-e. C’est une laque parsemée de poudre d’or ou d’argent, que l’on dispose à l’aide makizutsu (pinceau fait pour dessiner délicatement avec la poudre). Au fur et à mesure des années, on voit l’apparition de la peinture… à la laque (urushi-e). Les oeuvres d’Anne-Laure Sacriste servent d’introduction aux effets changeants des maki-e. Au Japon, l’artiste laqueur et peintre le plus connu du 19ème siècle est Shibata Zeshin. Son travail reflète le pont d’un travail passé aux visions futuristes. Un travail sans égal où l’on doit tourner autour pour voir tout le travail en 3D.

Nous y reviendrons très prochainement dans un futur article, mais la présence dans la salle d’une oeuvre d’Itô Jakuchu ne passe pas inaperçu ! Il est aisé de reconnaître ses oeuvres, il pose souvent des coqs, des phénix, des fleurs ou encore des poissons. Comme son oeuvre présenté, de la peinture sur soie nommée « Prunier et coq sous la neige ».

Au salon d’honneur, un sol en chantier travaillé, graveleux. Un esthétisme maîtrisé par Lee Ufan, s’adonnant à l’art contemporain. Ses outils préférés pour créer son idéologie de manière visuelle : la pierre, le bois, le papier et les plaques de fer. Le salon d’honneur en est rempli, et déstructure un élément, pour appuyer sur l’idée de coexistence entre le statique et le dynamique. Noriyuki Haraguchi et Min Tanaka suivent les mêmes mouvements que Lee Ufan : le mono-ha. Il met l’accent sur l’existence des objets. Dans une vidéo qui est diffusée lors de l’exposition, un documentaire de 1977 nous montre la vidéo d’un bassin de fer rempli d’huile usagée. Ici, il fait coexister la tranquillité et la brutalité.

Arrive l’une de mes deux salles préférées : pour encore plus casser ce côté tradition et culture, une exposition technologique met en avant le collectif Rhizomatiks. Daito Manabe fonde ce groupe de technologistes innovateurs en 2006. Des installations de grands écrans, où l’on peut visualiser les attaques en live (et véridique) des différents hackers dans le monde! Il ne montre pas qu’une banale carte avec des signalétiques, il a pu mettre une carte du monde en 3D, montrant toujours les attaques de hackers en direct, d’un pays à l’autre, d’un continent à un autre. Il nomme cette vision, « La Guerre invisible ». Un sujet qui en dit sûrement long.

Au vu de tous les artistes, il devait forcément y avoir… Katsushika Hokusai! Même ceux qui ne sont pas forcément intéressés par la culture artistique japonaise le connaissent. C’est ainsi dire LE maître des estampes japonaises (ukiyo-e). Il exerce plus de 70 ans de métier consacré qu’à cet art, et a influencé pour les plus grands de l’art tel que Van Gogh et Claude Monet. Ne manquez pas dans différents endroits les « Trente-six vues du mont Fuji », mais l’exposition Fukami ne regroupera que 12 oeuvres qui en valent le détour.

Et enfin, au sous-sol, mon deuxième lieu préféré de cette exposition où l’on voyage : « Foam ». L’exposition de bulles éphémères, créée pour l’occasion. Une installation sous les fines bulles de savon, qui grandissent et grossissent à vue d’oeil. Montrant que tout né, grandit, se transforme, et meurt. Un nuage au sous-sol, une envie de se baigner dedans, mais que l’on a pas envie de le toucher, car on sait que comme tout nuage, il est insaisissable. Kohei Nawa nous avait surpris avec son exposition au Musée du Louvre, il continue à nous surprendre par la diversité de ses capacités artistiques. Il sonnera la fin de notre visite.

Bien évidemment, je n’ai pas mentionné toutes les oeuvres que nous avions vu et commenté ce jour-là. Mais de l’extrait que vous avez pu lire, il est simple de deviner que l’on touche à réellement tous les thèmes. Il est conseillé à n’importe quel âge et pour tous les goûts.
Lieu : Hôtel Salomon de Rothschild – 11 Rue Berryer, 75008 Paris
Tarif : 5€
Exposition du 14 juillet au 21 août 2018